Gaumont nous présente le film « Patients », biopic du livre de Fabien Marsaud soit « Grand Corps Malade » co-réalisé avec Mehdi Idir. Ayant déjà collaboré ensemble, notamment dans les clips de l’artiste et d’un court métrage, Mehdi Idir s’attaque à son premier film. Et quel film! Son ambition pour un long métrage est tout à fait attestée. Élu meilleur film au Salamandre d’Or, ce film est à défendre et à partager.
Patients
C’est l’histoire de « Ben », admis dans un centre de rééducation après un accident. Il est diagnostiqué tétraplégique incomplet. On suit son parcours dès la table de billard à sa sortie méritée. Dans ce centre inhospitalier au premier abord, il apprendra à vivre avec son nouveau corps. Le personnel médical pouvant à tord, traiter les résidents comme simples patients plutôt qu’humain, est présent à toutes les étapes notamment par le kinésithérapeute. Il lui permettra de lui faire acquérir petit à petit sensibilité et mobilité. Actif dans la reconstruction du jeune homme, il est aussi un soutient non négligeable pour Ben.
Les aides soignants, malgré leurs défauts lui porte assistance. Christiane bien qu’elle soit aide soignante, aide comme une manche! Jean-Marie interprété par Alban Ivanov, toujours d’extrême bonne humeur n’est pas méchant mais pouponne Ben comme un bébé pour son plus grand déplaisir. De quoi ne pas les supporter. Pourtant, au fur et à mesure, on s’attache à ces drôles de spécimens.
Le monde hospitalier perçu comme clos, froid et distant, paraît au fil du temps, sécurisant et affectueux. Le jeu de contraste sur l’environnement avec un début de film ou Ben ne dort pas à cause de cris, pleurs d’autres patients et l’évolution vers une sphère singulière est grandement bien amenée. Le cadrage fixe sur les personnages s’élargit et le monde devient plus aérien. De même, l’évolution psychologique de Ben évolue et s’épanouie. Vu au départ comme une punition, ce centre s’avèrera pour lui comme une seconde naissance pour lui.
La force de ce film est le jeu des acteurs et la symbiose crée entre eux. Pablo Pauly interprétant Ben est criant de vérité. Avec un travail en amont : perte de poids, exercices supervisés par le vrai kinésithérapeute de Grand Corps Malade, le tout porte un crédit incroyable au niveau de la gestuelle. Des rencontres entre acteurs et handicapés ont étés menées, et ont permit de puiser, de s’inspirer de ces profils pour jouer merveilleusement bien. Leur adaptation et leur immersion donne un résultat bluffant. Certains figurants sont de réels patients du centre dans lequel Grand Corps Malade a fait sa convalescence. Un de ces anciens camarades, Samir un trauma crânien, a un rôle superbe.
Patience
La patience, il en faut en matière de rééducation mais surtout dans un quotidien routinier en exécutant gestes répétitifs ou en attendant une assistance. Et lorsque que ces malades ne sont plus en effort, il faut « niquer des heures » au mieux. Dans un endroit plein de « bras cassés », il y a des histoires à raconter mais aussi des blagues pour tuer le temps (long), accepter et avancer.
L’ironie et le cynisme de Ben de ses premiers jours dédramatisent son hospitalisation et nous met à l’aise face à ce « tabou » qui ne devrait pas l’être. Des situations cocasses ou des délires de ces jeunes (avant tout) handicapés sont tordantes. L’humour qu’il soit fin, grotesque ou trash est omniprésente et rend le film des plus divertissant. Cette vie en collectivité tissent des amitiés, des désaccords, des désillusions, des amours et des espoirs, émotions qui ne sont pas que réservés aux valides.
En 1h50, des messages universels sont diffusés à tous. Pour quelles raisons? Parce que c’est un film sur les relations humaines et non sur le handicap. Bien sûr, les personnages représentés sont handicapés, mais c’est avant tout l’histoire de la vie d’un jeune homme, privé de sa liberté qui luttera pour l’acquérir même si ce n’est que manger par lui-même ou accéder à son lit seul.
Impatients
Impatient de pouvoir se relever, avoir un fauteuil, faire quelques pas. Ben est confiant en ses capacités, ne fléchissant jamais ou presque… C’est l’histoire de personnes qui ont eu un coup dur mais qui se « relèveront ». Ce n’est donc pas un film sur la complaisance ou critique du corps hospitalier, ou encore, une revendication sur la cause des handicapés! Sans rentrer dans le sentimentaliste, la trame de l’histoire bénéfice d’une grande justesse. On ne plaint pas Ben. On le voit tel qu’il est, comment il évolue et on souhaite son progrès. Le point positif de ce film est qu’il est positif!
Le thème de la bande originale du film, par Angelo Foley qui a participé au dernier album de Grand Corps Malade met en complète immersion le spectateur. Également, un titre spécialement écrit pour le film de Grand Corps Malade « Espoir adapté » est présent. Bœufs guitare voix ou rap fauteuil motorisé comme platine, la musique est dans le film porteur de courage et d’évasion.
Ce film nous tire les larmes, nous tord de rire et doit être vu absolument. En salle le 1 mars 2017.