- Auteur : FURUYA Usamaru
- Genre : Seinen
- Éditeur : Delcourt x Tonkam
Synopsis : Haruto Higashiyama n’est excité que par le risque de se faire tuer par une lycéenne. Cet autassassinophile est donc devenu professeur dans l’espoir de pouvoir être un jour mis à mort par une lycéenne. Il jette son dévolu sur une de ses élèves, rêvant d’être assassiné de ses douces mains de jeune fille. Il prépare alors son plan minutieusement, révélant petit à petit sa personnalité pour le moins grotesque…
Usamaru Furuya est un auteur (peu) connu en France pour ses travaux tels que Genkaku Picasso, publié chez Tonkam ou encore l’excellent Litchi Hikari Club, dont on attend toujours désespérément une édition française. Furuya traite différentes thématiques telles que la jeunesse japonaise, l’homosexualité ou encore les fantasmes glauques comme dans Je voudrais être tué par une lycéenne, que l’on retrouve chez Delcourt x Tonkam.
Comme il est dit précédemment, le principal thème de l’oeuvre est le fantasme sexuel. Au travers du personnage de Haruto, professeur dans un lycée, l’auteur ne choisit pas seulement de mettre en scène la perversité de son protagoniste mais la décortique en profondeur, superposant les couches du passé de Haruto afin de faire comprendre au lecteur le fantasme du héros. Dès le début du premier tome, on entre donc directement dans l’histoire de la vie du jeune homme, de ces premiers pas à l’école jusqu’à sa fonction de professeur, en passant par sa première petite-amie, sa première fois et bien évidemment, comment ses pulsions sont nées. Furuya explore donc les déboires d’une réalité biaisée puisque l’ambition de Haruto, son objectif, la seule chose sur quoi repose sa vie n’est qu’un fantasme, un rêve, une idéologie. C’est donc une succession de délires fantasmagoriques qui s’enchaînent laissant place à un personnage, ironiquement, très terre à terre. Furuya dépeint toujours la jeunesse avec le portrait de trois jeunes lycéens, Maho, Aoi et Yukio. Avec ces derniers, il se centre sur des jeunes qui sont tous différents les uns des autres mais qui constituent, avec la présence de Haruto, le club d’étude des vestiges de Nitaka.
Furuya ne se concentre donc pas seulement sur son personnage principal ainsi que sur son but éponyme mais également sur d’autres personnages qui ont leur importance ainsi que leur profondeur respective. Maho, cible du professeur, va vite être positionné comme étant l’objet de désir de Haruto. Evidemment, il ne s’agit en rien d’un désir sexuel mais celui-ci va vite tomber sous le charme de la jeune fille, jetant son dévolu sur la lycéenne. Il n’y a plus d’autre option possible pour lui : il sera tué par Maho Sasaki. Cette dernière est tout d’abord présenté comme une adolescente tout ce qu’il y a de plus normal : elle est jolie, intelligente, adorée de tous, en somme une fille parfaite. Cependant, il est mal connaître Furuya que de penser que l’écriture du personnage s’arrête là. Au fur et à mesure que l’on avance dans le volume, on découvre une Maho plus sombre que l’on pourrait le croire, arrivant à la révélation qui rendre le personnage bien plus intéressant. De l’autre côté, Aoi Goto n’est pas à délaisser. En effet, la meilleure amie de Maho est présentée comme étant une jeune fille avec un QI surélevé, passant ses journées à l’infirmerie car elle ne se même pas aux autres, suite à plusieurs troubles psychologiques durant son enfance. Etant l’opposé de Maho, les deux jeunes filles se complètent donc, en trouvant ce qu’il manque chez l’une au sein de l’autre, les rendant plus proches que jamais. Aoi souffre également de son intelligence et de son talent pour tout et rien, dès son plus jeune âge, elle se fait traiter de menteuse lorsqu’elle présente à son professeur un dessin qu’elle a fait, celui-ci jugeant qu’il était trop bien fait pour une fillette de son âge. Suite à cela, elle n’a cessé de brider ses capacités pour ne pas subir le jugement des autres. Furuya met alors en avant une certaine oppression de la société et va même plus loin lorsque la jeune Aoi arrive à prédire des tremblements de terre, ajoutant ainsi une légère pointe de supernaturel. Le dernier lycéen du trio, second personnage masculin de l’histoire, Yukio est le personnage le plus basique. Jeune homme normal, il est amoureux de Maho et voit en la personne de Haruto, un potentiel rival. A lui seul, il devient le personnage qui incarne la normalité et l’humour.
Le dessin de Furuya est toujours aussi précis. Bien que moins « fou » que pouvait l’être Lichi Hikari Club, on parvient tout de même à reconnaître la patte graphique de l’auteur. Avec des personnages très basiques visuellement, presque tous ont les cheveux, ajoutant une part de réalisme. Les décors sont également très travaillés et valent le détour puisque le site de Nitaka est au centre de plusieurs parties de l’intrigue. La mise en scène est soignée comme à l’habitude de Furuya. Ce dernier ne lésine pas sur les expressions et empli ses personnages de diverses émotions comme la peur, le désir, la joie, l’appréhension, l’inquiétude ou encore la rage.
En somme, Je voudrais être tué par une lycéenne est un très bon titre. Compilé en seulement deux volumes au Japon, il parvient à traiter d’un sujet qui dérange mais fascine étrangement. Le glauque est ce qui plait aux gens et Furuya le sait très bien et étant un fervent admirateur de l’eroguro, il s’enfonce dans les abysses de l’étrange et produit un titre enchanteur.