A l’occasion de l’avant-première du film Bungô Stray Dogs – Dead Apple –, nous avons eu l’honneur de rencontrer la productrice Mari SUZUKI ainsi que le chara-designer Nobuhiro ARAI, invités par Crunchyroll à la Japan Expo 19ème Impact.
Vous avez travaillé pour beaucoup de séries à succès comme Steins;gate ou encore Noragami, est-ce plus dur pour vous d’adapter une œuvre provenant de manga ou de jeu vidéo ?
Arai : En ce qui concerne le chara-design de Bungô Stray Dogs, le dessin original a été très facile à adapter, donc cela s’est fait très naturellement.
Préférez-vous travailler sur des films ou sur des séries animées ?
Arai :Chacun des deux possèdent ses propres difficultés. J’aime travailler sur les deux, je ne pourrais pas vraiment choisir celui que je préfère. Je me plais à travailler sur les deux formats.
Vous êtes donc encore présent sur le nouveau film Bungô Stray Dogs Dead Apple, avez-vous ressenti plus de pression en travaillant sur le film ou sur la série ?
Arai : Dès que l’on a su que l’on allait travailler sur le film, on s’est dit que le public s’attendait à une très bonne qualité donc cela rajoute évidemment de la pression. Le réalisateur Higarashi qui s’occupe de la série animée, nous donne généralement des storyboards en réfléchissant aux coûts, au budget de la série. Il pense vraiment à l’aspect financier en général et justement pour le film, quand j’ai vu le storyboard qui avait été fait, j’ai compris que c’était spécial. J’ai eu un peu peur en voyant ce storyboard (rires). Nous allions devoir nous préparer au pire pour cette nouvelle adaptation.
Vous aviez donc plus de pression en travaillant sur le film ?
Arai : Je dirais que c’était plus motivant.
Bones est un studio très prestigieux, comment est-ce de travailler dans un tel studio ?
Suzuki : Étonnement dans le monde de l’animation, quand on a un pied dedans et que l’on sait faire son travail et surtout que l’on accumule de l’expérience, on peut trouver du travail un peu partout. J’ai précédemment travaillé dans un autre studio pour engranger de l’expérience et peu après j’ai finalement choisi Bones.
Est-ce que le milieu de l’animation vous a-t-il toujours attiré et surtout avez travaillé sur d’autres projets en dehors de l’animation ?
Suzuki : J’ai toujours travaillé dans le monde de l’animation jusqu’à présent.En fait, depuis que je suis enfant, je souhaite créer des histoires qui puissent toucher le plus de monde possible. J’ai compris que le milieu de l’animation était le plus apte à faire cela, c’est donc pour cela que j’ai choisi de faire des animes.
Avez-vous reçu des directives spécifiques de la part du dessinateur original du manga de Bungô Stray dogs, Sango Harukawa, pour ce film ou avez eu des libertés concernant les personnages ?
Suzuki : En ce qui concerne l’auteur du manga, il participait toujours à nos réunions et nous laissait prendre quelques libertés sur certains points du scénario et nous autorisait souvent à tenter des choses inédites.
Au niveau du chara-design, deviez-vous vous caler directement sur l’œuvre originale ?
Arai : On m’a vraiment laissé carte blanche à ce niveau, la seule requête que j’ai eu de la part de l’illustrateur était, au début, quand j’ai fait un premier jet du personnage d’Akutagawa, on m’a juste demandé de changer les mèches de ses cheveux. En particulier la mèche de devant. (rires).
Vous êtes à la fois chara-designer et chef d’animation sur plusieurs séries, en quoi ces deux positions sont-elles différentes et surtout laquelle préférez-vous faire ?
Arai : Personnellement je trouve que ces deux métiers vont de pair. Il y a des moments où en tant que chara-designer où en tant que directeur d’animation, il y a des choses dans lesquelles on est forcément moins à l’aise. On ne sait pas dans quelle direction aller. Par exemple, quand on doit placer le personnage dans un décor ou comment mieux les adapter par rapport à l’histoire, c’est pour cela que je trouve qu’avoir ces deux expériences est plus avantageux.
Quel personnage de Bungô Stray Dogs aimez-vous le plus dessiner ? Et au contraire le personnage avec lequel vous avez le plus de mal ?
Arai : Celui que j’ai préféré dessiner était Edogawa Ranpo parce qu’il a toujours les yeux fermés et il est donc très facile à dessiner. Au contraire, le plus difficile a été Atsushi, le personnage principal car au fur et à mesure de la série, il prend en maturité et du coup le dessin doit s’harmoniser avec cette nouvelle maturité. J’ai toujours peur d’aller trop loin dans l’adaptation de mon dessin et qu’au final cela ne ressemble plus à l’œuvre originale. (rires).
Sur quelle autre œuvre aimeriez-vous travailler à l’avenir ?
Arai : Il y a énormément de mangas que j’apprécie mais ils ont déjà tous leurs propres adaptations en anime et du coup en ce moment, il n’y a pas d’œuvre que j’aimerais particulièrement adapter.
Aimeriez-vous collaborer avec d’autres chefs d’animation ou d’autres animateurs que vous admirez tout particulièrement ?
Arai : J’admire particulièrement Nakazawa Kazuto qui est le chara-designer de Samurai Champloo.
On a vu que Bungô Stray dogs s’est vraiment popularisé grâce à son adaptation en anime, pensez-vous aujourd’hui qu’un bon anime est nécessaire pour qu’une œuvre se fasse connaître ?
Suzuki : On ne fait pas spécialement l’anime pour faire vendre le manga, mais cela nous fait évidemment plaisir de contribuer à sa popularité, mais ce n’est vraiment pas la raison principale. Pour nous, le plus important est l’histoire que l’on veut adapter et surtout la manière dont on exprime notre amour pour une œuvre. Nous travaillons sur ces animes pour que les fans aussi puissent se retrouver autour de l’anime et qu’ils puissent apprécier encore plus le charme de l’œuvre originale.
Et pour vous Monsieur Arai ?
Arai : C’est la même chose pour moi. On ne fait pas ça dans le but de faire de la publicité à l’œuvre originale. On veut surtout l’adapter sous un autre format.
Y’a-t-il un message, quelque chose de spécial que vous vouliez faire passer à travers ce film ?
Suzuki : On n’a pas vraiment de message à faire passer en particulier à travers ce film mais c’est vrai qu’Enokido et Asakiri ont mis pleins de messages et de symboles dans ce scénario, à l’intention des fans. On a tendance à se concentrer sur l’avancée d’Atsushi lors du premier visionnage. Mais dès lors que l’on revoit le film plusieurs fois, on se demandera peut-être pourquoi le nouveau personnage, Tatsuhiko, se comporte aussi étrangement ou encore on pourra se poser des questions au sujet des sentiments de Dazai ou même sur l’héritage d’Odasaku. C’est vraiment aux fans de regarder le film et de trouver eux-mêmes ce qui les touchent le plus dans le film. C’est aussi pour cela que je veux que vous regardiez le film plusieurs fois ! (rires).
Arai : C’est pareil pour moi. Que ce soit la série animée ou le film, ce sont des œuvres très accessibles qui ne sont pas trop complexes et que l’on peut regarder tranquillement chez soi ou entre amis.
On a vu en particulier l’année dernière que Bungô Stray Dogs est devenu très populaire au Japon, il y a beaucoup de produits dérivés et aussi beaucoup de publicité autour de l’œuvre et justement cette ferveur s’est transmise en France aussi. Vous attendiez vous à ce que l’œuvre marche aussi bien en France ?
Suzuki : C’est ce que j’espérais en fait ! (rires) Il y a des personnages étrangers dans la série et j’espérais secrètement que cela puisse être projeté aussi en dehors du Japon.
Arai : Je n’y pensais pas du tout quand je travaillais sur le projet et cela me fait réellement plaisir de savoir que l’œuvre est aussi populaire ici.
On parle de plus en plus du déclin de l’animation japonaise, en particulier du fait que trop de manga soit adapté en anime et qu’au contraire il n’y ai pas assez d’anime originaux qui soient proposés. Qu’en pensez-vous en tant qu’acteurs de cette industrie ?
Arai : On a de plus en plus de projet d’anime et c’est vrai que du coup on se retrouve vite en manque de main-d’œuvre. Au milieu de tous ces projets, il y en a forcément des bons comme des mauvais.
Suzuki : La grande mission pour les producteurs de séries est de savoir rassembler une bonne équipe pour le bon projet et c’est quelque chose qui est devenu beaucoup plus dur de nos jours. On voit de moins en moins d’adaptations de manga en anime au Japon car ils ont pour la plupart déjà été adaptés. Mais au contraire, grâce à l’émergence des services de VOD comme Netflix ou encore Amazon prime, il y a une demande beaucoup plus forte au niveau des contenus originaux et je pense vraiment que dans quelques années on verra de plus en plus de projets de ce type.
Retrouvez les deux saisons de Bungô Stray Dogs sur Crunchyroll : http://www.crunchyroll.com/bungo-stray-dogs
Nos remerciements à l’équipe de Crunchyroll et à l’interprète Marylou Leclerc pour cette interview.