En 2017, quatorze ans après la sortie de son visual novel en 2004, Fate/Stay Night sortait le premier opus d’une trilogie de films, adapté de la dernière route du jeu : Heaven’s Feel. La licence a connu bon nombre de séries dérivées au cours de son existence mais c’est bel et bien Fate/Stay Night qui a le plus fait chavirer et marquer le coeur des fans. Après deux premiers films plus que moyens, comment Type-Moon, sublimé par l’animation du studio Ufotable a-t-il réussi à conclure l’une des saga les plus populaires des vingt dernières années ? Attentions spoilers à propos des deux premiers films !
Le film suit, dans les premières minutes, le même schéma que le précédent, à savoir la reprise directe de la scène qui avait clos Lost Butterfly. Par ce procédé, le film nous plonge directement dans l’histoire, sans avoir à passer par des scènes introductives. On retrouve donc immédiatement le corps inerte de Shinji, scène qui marquait un tournant, aussi bien pour le personnage de Sakura que pour l’intrigue en elle-même. Ceci relève donc le premier point positif du film : son rythme. Contrairement à Presage Flower, qui était entre lenteur et action et Lost Butterfly qui avait un rythme très chronophage, Spring Song arrive parfaitement à doser ses scènes d’actions ainsi que celles qui se veulent plus calmes. Les combats sont explosifs et nous en mettent plein la vue mais Ufotable a l’intelligence de ne pas les enchaîner trop vite, d’une, parce que ce n’est pas le cas dans le jeu mais aussi en mettant l’accent sur des scènes permettant de mieux comprendre les personnages ou l’histoire du Graal en lui-même. On parvient alors à digérer un film de deux heures, une durée inhabituelle pour un film d’animation, qui en général tourne autour d’1h40 ou 50 (dix minutes, c’est long, oui). Il y a un véritable travail de fidélité à l’oeuvre mais aussi de balance des scènes qui rendent le tout très digeste, nous empêchant de voir le temps passer.
Vous l’aurez compris avec la mort de Shinji, cette route est la plus sombre et adulte des trois. On le ressentait de plus en plus, au fur et à mesure que l’histoire avançait, à travers les films. Presage Flower avait un côté très lumineux qui s’assombrissait, petit à petit. Lost Butterfly jonglait entre jour et nuit mais ici, dans Spring Song, on est constamment sur des scènes sombres, avec peu, voire pas de lumière si ce n’est celle de lampadaires ou d’un bâtiment. L’atmosphère se veut oppressante, à l’image de ce qu’a ressenti Sakura toutes ces années et de ce qu’elle ressent aujourd’hui, en Dark Sakura. C’est très intéressant de voir que, certes elle est le personnage central puisqu’il s’agit de la route qui aborde son histoire, mais surtout que la nature-même des films tournent autour d’elle. Dès qu’elle commence à s’assombrir, les long-métrages suivent cette direction puis redeviennent plus lumineux lorsqu’elle retrouve l’espoir et basculent complètement dans les ténèbres lorsqu’elle tue son frère adoptif. Il y a une véritable envie de la placer au centre de tout, au-delà du cadre de l’intrigue.
Tout comme dans le film, c’est elle qui a le contrôle et l’ascendant sur les autres personnages, elle est la plus forte. Dans le second opus, c’était sa relation avec Shiro qui était mis en avant et on attendait plus de développement pour celle avec Rin et c’est chose faite ! Ce qui définit Sakura, c’est sa relation avec les personnages suivants : Rin, Shiro et les Matou. Il aura fallu attendre trois films (exceptés pour Shiro et Shinji) mais les liens qu’elle entretient avec eux sont complètement exploités ici. On parvient à comprendre sa douleur, pourquoi elle en est arrivée là et surtout, ce qui la différencie drastiquement de sa grande sœur. C’est un des piliers de ce troisième film et Ufotable a su parfaitement retranscrire la relation entre ces deux jeunes filles. Elles sont différentes, elles n’ont pas eu la même enfance, elles n’ont pas reçu la même éducation, elles sont sœurs et pourtant, elles se font face. Tout le travail autour de Rin, qui a une place très importante dans ce dernier film, est excellent et on « quitte » le personnage en étant fière de tout ce qu’elle a réussi à accomplir.
Shiro n’est pas sans reste non plus mais il n’est pas le protagoniste qui a le plus brillé même s’il bénéficie de très bonnes scènes. Malgré toute la bonne volonté de Type-Moon, dans le visual novel à la base, il n’a pas l’air d’être « à sa place » ici. Je parle surtout du dernier combat, qui n’était pas très impactant. La faute ne revient pas complètement au film puisque c’est un problème déjà présent dans le jeu. Les deux idéologies qui s’opposent, celle de Shiro et celle de son adversaire, sont intéressantes mais sonnent comme… « forcées ». Je pense sincèrement que cela vient du fait que ce mystérieux adversaire est mille fois plus intéressant lorsque l’on oppose à un certain homme… Quoi qu’il en soit, c’est le seul bémol qu’il y a : Shiro, bien qu’il ait un développement plutôt décent, n’est pas à son apogée niveau écriture comme il a pu l’être dans la seconde route, Unlimited Blade Works, mais ça, c’est parfaitement normal.
Outre ces trois personnages, on retrouve également Saber qui accomplit plutôt bien son rôle. Certains pourront dire qu’elle a été mis en retrait dans la quasi totalité des films mais ce n’est pas si mal que ça puisqu’elle pu permettre à d’autres de briller, comme Rider. Cette dernière est véritablement la révélation du film. Le trio des servants favoris des fans étant Lancer, Archer et Saber, Rider a souvent été boudé ou aimé par un petit comité. Ici, elle se dévoile complètement et son tandem avec Shiro est plus que cool à regarder. Dans un autre genre, je tiens à revenir sur deux personnages qui ont été exceptionnel durant tout le film : Illya et Kirei. De deux façons différentes, ils ont marqué au fer rouge ce troisième épisode. Illya est dans le cœur des fans, un personnage plus qu’apprécié et il était temps qu’elle ait son heure de gloire. Quant à Kirei, il est parfait de bout en bout. Il apporte quelques touches d’humour très bien amenées et nous offre des scènes d’actions superbes et on en découvre plus sur lui ainsi que sur son passé qu’on avait déjà évoqué dans Fate/Zero.
L’histoire prend également un tout autre tournant puisqu’on va s’intéresser ici à plusieurs choses dont la création du Saint-Graal, les premières guerres pour l’obtenir ainsi qu’un être mystérieux qui semble avoir un lien avec la relique sacrée. On va beaucoup plus en profondeur dans l’histoire-même de la saga Fate. Toujours dans un soucis de perfection au niveau du rythme, on nous en dévoile un peu plus, par-ci, par-là. Cependant, pour quelqu’un qui n’est pas familier avec l’univers de Fate ou bien qui n’a pas joué au jeu, c’est assez complexe. En effet, la licence aime beaucoup partir dans des allusions philosophiques, mythologiques, religieuses ou morales et quand on explique l’origine de telle ou telle chose, il faut s’accrocher. C’est très compliqué et c’est difficile de tout bien comprendre au premier visionnage mais là, c’est un problème qui est propre à Fate en lui-même. Il faut donc avoir de bonnes bases, connaître au préalable l’histoire ou juste être très doué pour tout bien comprendre et capter les subtilités disséminées un peu partout. En dehors de ce point-là, l’intrigue reste tout de même très bonne mais c’est quand même les relations des personnages qui sont plus intéressantes et qui de fait, priment sur l’histoire.
C’est assez étrange de se dire que la partie principale d’une saga qui existe depuis maintenant seize ans s’achève. Vous le savez, Fate/Stay Night n’est plus un simple visual novel qui a eu le droit à un anime. C’est devenu, au fils des ans, un véritable empire. Fate/Zero, Fate/hollow ataraxia, Fate/Aprocypha, Fate/Extra… La marque FATE a pris une ampleur incroyable et la saga est loin de s’arrêter. Cependant, dire au revoir à ces personnages, qui accompagnent certains depuis le jeu, en 2004, d’autres depuis le premier anime en 2006, d’autres plus récemment, c’est quand même un sentiment bien particulier. Bien entendu, on les reverra, notamment Shiro, Rin, Saber ou encore Sakura dans d’autres séries, comme Fate/Grand Order mais la saga Fate/Stay Night s’arrête… pour le moment. On est jamais à l’abri d’un reboot du premier anime qui était une espèce de mélange des routes.
Fate/Stay Night s’achève mais Fate se poursuit et sera de retour plus vite que vous ne le croyez dans les salles obscures. La prochaine d’urologie de films arrive en décembre au Japon, adaptant la singularité de Camelot, dans Fate Grand Order. Le premier film s’intitule Divine Realm of the Round Table: Camelot – Wandering; Agateram et on croise les doigts pour que Wakanim puisse le sortir chez nous aussi !