- Auteurs : Mr TAN (story), Mato (art)
- Genre : Drame, Fantastique
- Editeur : Glénat
Synopsis : Aki ne retrouve plus le chemin pour rentrer chez lui. Tout le monde semble indifférent à cet enfant perdu. Tous… sauf Jizo, un étrange garçon sorti de nulle part. Est-ce un enfant des rues ? Va-t-il vraiment le ramener chez lui ? A-t-il raison de le suivre dans le temple où il l’emmène ? Malgré son grand sourire, Aki peine à faire confiance à son nouvel ami. Surtout qu’une effroyable sorcière chasse les enfants à la tombée de la nuit…
Mr Tan, de son vrai nom Antoine Dole n’est pas un inconnu des mordus de lecture. Que ce soit dans le milieu romanesque avec Ce qui ne nous tue pas ou encore dans celui de la bande-dessinée avec Mortelle Adèle, en passant par Tout foutre en l’air et La femme à barbe, il fait parti des auteurs les plus intéressants à suivre de la décennie passée. Cette fois-ci, il s’attaque au genre du manga qu’il connaît plutôt bien puisqu’il avait déjà scénarisé le titre 4Life, en 2018. Accompagné par la talentueuse illustratrice Mato, il forme un duo franco-japonais qui nous propose une histoire touchante, aux allures de conte.
L’auteur nous fait donc plonger dans un récit où Aki, un jeune garçon se retrouve seul dans un parc, ne sachant plus où est sa mère et ne retrouvant plus son chemin. Il y fait la connaissance de Jizo, un autre petit garçon qui lui propose de l’aider à rentrer chez lui. On vous l’accorde, le pitch de départ fait énormément penser à un Ghibli, plus précisément au Voyage de Chihiro. Ne vous y trompez cependant pas, c’est le seul point commun que l’on retrouve entre les deux œuvres. Si Le Voyage de Chihiro est très coloré que ce soit grâce à ses décors, ses paysages ou ses personnages, Jizo est tout l’inverse. Il fait passer sa narration par un vide total comparé au célèbre long-métrage. Il n’y a que très peu de personnages, l’aspect onirique passera essentiellement par des paysages typiquement japonais et non pas fantastiques. On ne suivra donc que les deux garçons, qui seront amenés à faire face à une menace. Cette envie de ne pas noyer son récit dans un surplus de personnages permet donc de se concentrer sur le protagoniste, Aki.
Pour ceux qui s’y connaissent un peu en culture japonaise et plus précisément, en bouddhisme, vous saurez tout de suite quoi parle le manga. A la rédaction, nous n’avons pas été surpris en apprenant qui était réellement Jizo mais ce n’est pas grave. L’histoire est touchante et émeut à plusieurs moments tant on est investi dans le périple de ce petit garçon. Tout l’intérêt du récit ne réside pas dans le fait de comprendre pourquoi Aki en est arrivé là ni même comment mais d’apprendre à avancer et à accepter les choses.
Le travail de Mato est aussi à souligner. Elle prend le soin de nous retranscrire un Japon moderne mélangé au folklore nippon. Aki étant le point d’ancrage du récit, il fait le lien entre le Japon de notre réalité et l’autre monde. Le style de l’illustratrice nous a grandement fait penser à celui de Yoshizumi Wataru ou celui de Takahashi Rumiko. Les traits sont simples, ce qui ne dénature pas les personnages. Hormis celui qui menace nos deux héros, tous les autres semblent normaux, amplifiant le côté « ordinaire » du récit car Aki part du monde normal, dans lequel nous sommes à un autre, qui semble si loin et pourtant si proche.
Le terme de « manga » n’est pas réellement approprié pour définir Jizo. La forme s’inscrit bien sûr dans ce type de bande-dessinés mais l’histoire est si poétique et touchante qu’elle nous fait penser à un conte. L’ennemi que doivent affronter Aki et Jizo fait complètement référence à ces livres que l’on dévorait lorsque nous étions plus petits. Cette œuvre réussit l’exploit de nous faire retomber en enfance tout en nous confrontant à des problématiques qui nous font nous poser beaucoup plus de questions quand on est adultes. Mr Tan et Mato parviennent à nous émouvoir grâce à un récit fort, qui s’ancre bien dans notre époque.