- Auteur : HATOYAMA Ikuko, HORI Tatsuo (œuvre originale)
- Genre : Fantastique, suspense
- Editeur : Noeve Grafx
Synopsis : ”Au début du XXe siècle, le personnage de Zigomar, criminel masqué créé par Léon Sazie, déchaîne les passions et l’imagination des jeunes garçons. Gigi et Kiki sont de ceux-là, tout comme le reste de leur petite bande. Des gamins ordinaires.
Mais Gigi est différent : plus fort, plus beau, plus charismatique, il suscite l’admiration et parfois la peur de Kiki, qui tente de le cerner…”
HATOYAMA Ikuko marque ici son premier titre à être publié en France, et c’est aux éditions Noeve Grafx que nous avons le plaisir de voir paraître le one-shot À tire d’Aile dans une qualité d’édition toujours aussi magnifique, comme le fait si bien l’éditeur. Artiste au talent incontesté, nous aurons le plaisir de voir également une autre œuvre de la mangaka édité chez Noeve : Dovecotte Express. À tire-d’Aile est l’adaptation d’une nouvelle du célèbre romancier et poète HORI Tatsuo, que vous connaissez sûrement sans le savoir, car c’est à lui que l’on doit le roman Le vent se lève qui a eu droit à une adaptation par MIYAZAKI Hayao du studio Ghibli. Un auteur très inspiré par la littérature française, et c’est quelque chose que l’on retrouve dans son œuvre et dans cette adaptation en présentant le personnage de Zigomar, criminel crée par Léon Sazie au début des années 1900. S’il est plutôt oublié dans la culture populaire actuelle, le personnage aura marqué son époque et a eu droit à des adaptations cinématographiques par Victorin Jasset.
Dans À tire-d’Aile, nous suivons des enfants, fans de Zigomar, un personnage qui est loin d’être un super-héros, il est même tout le contraire; c’est un criminel poursuivi par la police, à l’allure digne d’un gourou d’une secte, il est le chef de « la bande des Z ». Les enfants s’amusent à imiter le criminel et les policiers qui le poursuivent. Nous nous concentrons sur les personnages de Gigi et Kiki, dont l’amitié sera au cœur du récit. C’est à la suite d’un drame familial que Gigi disparaîtra du jour au lendemain, vivant désormais la nuit avec pour acolytes des pigeons, et menant une vie de voleur pour survivre. Tout le monde au village semble l’avoir oublié, sauf Kiki qui, lui, espère retrouver un jour son ami. De plus, les traits du jeune garçon sont si fins qu’il ressemblerait de base déjà à une demoiselle. L’atmosphère du titre peut rappeler les anciens shôjo et boy’s love dans le traitement de cette relation et des personnages. Par exemple, Kiki admire Gigi, il pourrait même en avoir peur, et leur relation paraît être plutôt ambiguë bien que rien ne soit dit clairement. De plus, nous verrons Gigi se travestir en jeune fille pour pouvoir se montrer de jour. Tout cela est montré de façon très poétique, à l’instar de Gigi qui s’envolerait avec les oiseaux pour être enfin libre. Car c’est aussi ce dont traite le manga : la liberté recherchée par ce jeune garçon qui tente de survivre et surmonter son deuil en se prenant totalement au jeu de Zigomar. Le récit saura aussi être plutôt froid, cruel et dramatique, À tire-d’Aile ne laissera ses lecteurs en aucun cas indifférents.
Graphiquement sublime, HATOYAMA réussit à donner parfois le sentiment de regarder un film d’époque. Ses planches fourmillent de détails et de finesse, et nous nous perdons à admirer ces dernières avant de tourner les pages. Son trait peut aussi rappeler celui de Maruo -pour ne citer que lui-. Le travail de l’éditeur sublime encore plus le titre, de part l’objet-livre absolument superbe, et nous pouvons dire que le manga méritait bien un tel traitement ! À tire-d’aile n’est cependant peut-être un titre grand public et qui ne plaira certainement pas à tous, mais pour ceux pour qui la poésie et la beauté de l’ouvrage réussiraient à parler, il faudra prendre le temps de savourer sa lecture voire de la digérer pour certains. Vous serez perdus entre rêve et réalité, comme les enfants du récit…
Il aura fallu du temps pour enfin voir un titre de Hatoyama arriver chez nous, mais l’attente en valait la peine : À tire-d’aile est une petite merveille et c’est un réel bonheur de voir des titres de cette qualité en France. Énorme coup de cœur, nous espérons qu’il saura parler au plus de monde possible car ce genre d’ouvrage fait du bien au monde du manga, même s’il est évident que le titre n’est pas fait pour tout le monde… mais ne serait-ce que pour la beauté du livre (et ce dans tous les sens que nous pouvons donner au terme), nous vous invitons vraiment à vous intéresser à cette œuvre !